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sagesse, ce sera donc en même temps retracer l’histoire de l’âme moderne.

Cependant on aurait tort de croire que, pour parler toujours à la première personne, Gide se soit livré tout entier dans son œuvre. N’attendons de lui ni la demi-sincérité bavarde, ni la lâche complaisance, ni l’orgueil mal dissimulé de l’homme qui n’avoue de son moi que ce qui peut lui faire honneur.

Si son œuvre renferme la confession d’une âme, c’est — d’après l’expression de Jules Laforgue, caractérisant l’œuvre de Baudelaire, — «une confession modérée ») [1]

Et ceux-là seuls peuvent comprendre cette confession, dont l’âme a traversé les mêmes alternatives de doute et d’espoir, de défaillance et de victoire. Aussi bien nous croyons que pour bien interpréter les idées de Gide, il faut les penser à nouveau ; de même que, pour goûter la saveur un peu amère de ses livres, il faut les avoir vécus. C’est ce travail de reconstitution que nous avons tenté dans les pages qui vont suivre. Nous n’ignorons pas que notre thèse ayant pour objet l’œuvre d’un auteur contemporain, ne saurait comporter cette rigueur scientifique, ni atteindre à ces con-

  1. 1) «Le premier, il se raconta sur un mode modéré de confessionnal, et ne prit pas l’ air inspiré » (Jules Laforgue, Mélanges posthumes II, Notes sur Baudelaire).