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ficateur, la dialectique est dynamique et idéaliste. Comment et pourquoi Marx les a réunis, voilà le problème.

Entre Hegel et Marx, il y a un intermédiaire dont il nous faut d’abord dire un mot, c’est Feuerbach. Avec tous les matérialistes du xviiie siècle, Feuerbach nie l’origine divine de la religion ; mais il ne croit pas comme eux qu’elle soit une invention des prêtres destinée à dominer leurs semblables ; sa thèse est plus complexe ; selon lui, il y a, dans la religion, une véritable aliénation de l’homme à l’égard de lui-même : ce que l’homme vénère sous le nom de Dieu, c’est lui-même, mais il ne le sait pas, et il faut qu’il ne le sache pas d’abord pour que la religion développe tous ses effets bienfaisants. Mais une fois arrivé à son point de maturité, l’homme reprend le bien qu’il avait développé en l’aliénant ; la philosophie lui fait connaître que l’objectivité de la religion est illusoire et que c’est l’homme qui, par elle, s’adresse à l’homme. Le matérialisme avec Feuerbach prend donc une allure dialectique, puisqu’il consiste non pas à nier, mais à dépasser une opposition ; l’homme après s’être aliéné lui-même, se retrouve spirituellement enrichi.

La dialectique de Marx est à la fois la critique et la continuation de celles de Hegel et de Feuerbach. À la première, il reproche son carac-