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qu’à celle de moi-même : « Je pense, donc je suis. » Chez Plotin, l’intériorité, l’approfondissement du moi en lui-même, dépassent tout de suite le moi, et montent à une réalité qui le fait oublier, à l’Un transcendant, qui est au-dessus de toute détermination. La subjectivité est donc inséparable de la transcendance ; on ne peut se découvrir soi-même sans se dépasser. L’acte de transcender entre dans la structure même du sujet. Il semble que ce que l’on découvre ici dans la vie intérieure, c’est le contact avec une réalité d’un autre ordre, qui est par excellence un Autrui, cette sorte de vie sociale transcendante qui faisait dire à Guillaume de Saint-Thierry, au xiie siècle, que le moine n’était jamais moins seul que quand il méditait, solitaire, dans sa cellule : l’invocation, la grâce divine ont pour effet de polariser en quelque sorte le moi et cet Autrui divin transcendant, à tel point que la vie religieuse signifierait moins une acquisition qu’une structure essentielle à notre moi. J’ai montré, dans ma précédente causerie, comment selon les sociologues contemporains le rapport entre ces trois termes Moi-Autrui-Nous, n’était pas un rapport entre des termes d’abord extérieurs et réunis ensuite. Il semble que, dans une philosophie religieuse d’inspiration augustinienne, telle que celle de M. Gabriel Marcel, le rapport du Moi à la Trans-