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totalité du monde, sont de pures illusions de l’esprit, ou qu’ils ne prennent de sens que s’ils sont intérieurs à la conscience (par exemple Brunschvicg déclare que « dans la conscience seulement se découvre le Dieu des êtres raisonnables comme la racine des valeurs que toutes les consciences reconnaissent également »), il n’y a pas loin.

Les raisons qui font rejeter l’immanentisme ne sont pas seulement intellectuelles. Songeons seulement que le positivisme de Comte, pour faire admettre l’agnosticisme, pour débarrasser l’esprit de cette recherche sur le transcendant, ne voyait d’autre moyen que de créer une religion de l’humanité. Il s’agit donc, dans des questions de ce genre, de la destinée humaine et d’un besoin qui ne se croit satisfait que par un appel au transcendant.

Ce qui est en question, c’est le puissant mouvement rationaliste et critique qui s’est développé surtout depuis le xviie siècle, qui a mis en opposition les conditions d’une connaissance pure et légitime avec les besoins d’une âme croyante ; cette opposition a pu être longtemps masquée par une simple juxtaposition, indifférente à la contradiction ; mais cette situation n’est plus possible dès que l’immanentisme prétend tenir toute la place et résoudre par lui-même le problème religieux.