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genèse des phénomènes complexes par l’addition ou la sommation d’éléments simples. Mais par la seule addition des éléments, on ne peut expliquer comment ces éléments entrent dans une structure ; réduire les faits psychologiques complexes à une addition d’éléments, c’est un peu comme si l’on disait que la cathédrale de Paris est un tas de pierres posées les unes sur les autres. Nous avons en effet à un bout des sensations et des images, à l’autre bout des faits complexes tels que la perception des objets, les actes volontaires, les raisonnements, d’une part une matière muable, changeante au hasard des impressions, d’autre part des formations relativement stables, dans lesquelles la conscience est maîtresse d’elle-même.

L’association n’est sûrement pas l’architecte qui nous permettra de passer des impressions à ces formations stables ; car elle dépend elle-même du hasard ; on la voit fonctionner dans le rêve, dans la rêverie, dans des états mentaux vagues et mobiles qui contrastent avec les solides structures de notre mentalité. Dire le contraire, c’est comme si l’on nous proposait de composer un mot d’une langue étrangère et complètement inconnu pour nous, en nous donnant les lettres qui le composent : nous ne pourrons faire l’opération avec succès que si nous connaissons d’abord le mot. De même, il faut ici connaître