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prètes les meilleurs ne sont pas tous d’accord sur sa pensée ; mort peu après la guerre, en 1945, après avoir eu depuis 1933, dans des circonstances difficiles, une attitude digne d’un philosophe de race, il a exercé, malgré cette obscurité, une influence si étendue et si profonde, qu’il est impossible de rien comprendre aux mouvements variés qui agitent la pensée contemporaine sans en tenir compte. Aussi vais-je tâcher de faire saisir, au moins sous certains aspects, le sens de cette révolution.

L’objet de ma causerie sera moins la pensée de Husserl, avec toutes ses variations, que le sens de l’influence qu’elle a exercée, et les mouvements, plus ou moins indépendants de lui qui l’ont confirmée.

Husserl définit la phénoménologie non comme une acquisition de connaissances nouvelles venant s’ajouter aux anciennes, mais comme un changement de perspective ou (autant qu’on peut traduire son allemand) comme « une direction de notre regard se détournant des réalités expérimentées vers ce caractère même d’être expérimentées[1] ». On peut l’expliquer ainsi : dans la connaissance naturelle, par une sorte de fascination (tel était le mot de Plotin pour désigner la connaissance sensible), notre ap-

  1. Phänomenologie und Psychologie, édit. Van Breda, p. 488.