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créatrice et critique, capable d’inventer et simultanément de justifier la vérité de ces inventions. La science est donc tout autre chose qu’un ensemble de recettes pour le bien-être de l’homme ; elle est avant tout exigence de vérité, et Brunschvicg voit en elle le principe authentique de toute vie spirituelle ; il termine son œuvre en souhaitant que l’homme « sache transporter dans le domaine de la vie morale et de la vie religieuse cette sensibilité au vrai défiante et délicate, qui s’est développée en lui par le progrès de la science et qui est le résultat le plus précieux et le plus rare de la civilisation occidentale ».

Je pourrai montrer par bien d’autres exemples, entre autres celui d’Eucken en Allemagne, de Bradley en Angleterre, de Croce en Italie, quelle fut, au début de notre siècle, la force du mouvement spiritualiste, et, en même temps, sa variété d’aspect. Disons que, à cette époque, on considère l’esprit non pas comme un résultat mais comme un principe ; on voit la vanité de toutes les analyses réductrices qui essayent de fabriquer le complexe avec des éléments simples. Mais, d’autre part, on veut un spiritualisme positif, qui ne se contente pas d’affirmations générales ; et on l’obtient par une sorte de retournement, d’inversion. La donnée immédiate n’est plus la sensation superficielle, mais le moi profond ;