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tué les Sauuages l’appreſtent en plus de vingt façons, & ne ſe ſeruent cependant que de feu & d’eau ; il eſt vray que la meilleure ſaulce eſt celle qu’il porte auec ſoy.

Pour les dangers de l’ame à parler nettement, il n’y en a point pour celuy qui apporte aux Pays des Hurons la crainte & l’amour de Dieu ; au contraire i’y trouue des aduantages nompareils pour acquerir la perfection. N’eſt-ce pas deſia beaucoup de n’auoir dans le viure, le veſtir & le coucher aucun attrait que la ſimple neceſſité ? N’eſt-ce pas vne belle occaſion de s’vnir à Dieu, quand il n’y a creature quelconque qui vous donne ſuiet de vous y attacher d’affection ? quand les exercices que vous practiquez vous obligent ſans violence à la recollection interieure ? Outre vos exercices ſpirituels vous n’auez point d’autre employ que l’eſtude de la langue, & la conuerſation auec les Sauuages. Ah ! qu’il y a de plaiſir pour vn cœur ſelon Dieu de ſe faire le petit Eſcolier d’vn Sauuage, & d’vn petit enfant pour les gagner par apres à Dieu, & les rẽdre Diſciples de noſtre Seigneur ! Que Dieu ſe communique volontiers, & liberalement à vne ame qui practique pour ſon amour ces actes heroïques