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quatre cens ménages ; qu’ils cultiuent des champs, d’où ils tirent à ſuffiſance pour leur nourriture de toute l’année, & qu’ils s’entretiennent en paix & amitié les vns auec les autres. Il eſt vray que ie ne penſe pas qu’il y ayt peut-eſtre Nation ſouz le ciel plus recõmandable en ce point qu’eſt la Nation des Ours ; oſtez quelques mauuais eſprits qui ſe rencontrent quaſi par tout, ils ont vne douceur, & vne affabilité quaſi incroyable pour des Sauuages ; ils ne ſe picquent pas aiſément : & encor s’ils croyent auoir receu quelque tort de quelqu’vn, ils diſſimulent ſouuent le reſſentiment qu’ils en ont ; au moins en trouue-on icy fort peu qui s’échapent en public pour la colere, & la vengeance. Ils ſe maintiennent dans cette ſi parfaite intelligence par les frequentes viſites, les ſecours qu’ils ſe donnent mutuellement dans leurs maladies, par les feſtins, & les alliances. Si leurs champs, la peſche, la chaſſe, ou la traitte ne les occupe ils ſont moins en leurs Cabanes que chez leurs amis ; s’ils tombent malades, & qu’ils deſirent quelque choſe pour leur ſanté, c’eſt à qui ſe monſtrera le plus obligeant. S’ils ont vn bon morceau, ie l’ay déja dit, ils