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en vne ſaiſon, où il y auoit prés de trois pieds de neige, auſſi gaillards neantmoins en apparence que s’ils euſſent gagné. Ce que ie trouue de plus remarquable en ce point, c’eſt la diſpoſition qu’ils y apportent. Il s’en trouue qui ieuſnent pluſieurs iours auparauant que de iouer : la veille ils s’aſſemblent tous dans vne Cabane, & ſont feſtin pour cognoiſtre quelle ſera l’iſſue du ieu. Celuy qui eſt choiſi pour tenir le plat, prend les noyaux, & les met indifferemment dans vn plat, & le couure, en ſorte que perſonne n’y puiſſe mettre la main ; cela faict on chante ; la chanſon acheuée, on decouure le plat, & les noyaux ſe trouuent ou tous blancs, ou tous noirs. La deſſus ie demanday à vn Sauuage, ſi ceux contre leſquels ils deuoient iouer, ne faiſoient pas le meſme de leur coſté, & s’ils ne pouuoient pas rencontrer les noyaux en meſme eſtat ; il me dit qu’ouy ; & cependant luy diſ-ie, tous ne peuuent pas gagner ; à cela il ne ſçeut que répondre. Il m’apprit encor deux choſes remarquables : premierement qu’on choiſiſſoit pour manier le plat, quelqu’vn qui auoit ſongé qu’il gagneroit, ou qui auoit vn ſort ; au reſte ceux qui en ont pour quoy que ce ſoit, ne s’en cachent point, &