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LES IDÉES LATENTES DU LANGAGE.


jeunes gens instruits et curieux Il n’est point de recherche, si spéciale qu’elle soit, qui ne soit capable d’inspirer le plus vif intérêt, du moment que fauteur, ne perdant pas de vue l’état général de la science, sait la place nue son travail occupera dans l’œuvre commune. Il n’est point de patois, si obscur et si humble qu’il paraisse, qui ne devienne précieux aux yeux de l’historien et cher à un patriotisme intelligent, si nous songeons que chaque dialecte contient une portion de notre passé et représente une des facettes du génie national.

N’avons-nous pas vu récemment la chronologie s’introduire jusque dans une période de nos langues pour laquelle il ne nous reste aucun document écrit, et que nous pouvons seulement atteindre par un travail d’induction scientifique ? Vous savez tous que la comparaison des idiomes indo-européens permet de reconstruire, au moins en ses traits généraux, la langue dont ils sont sortis. C’est à cette langue primitive que l’un des maîtres de notre science, M. George Curtius, essaye d’appliquer la méthode historique s’aidant des observations les plus fines et les plus sagaces, il démêlé les créations grammaticales qui, en se suivant et en confondant leurs effets, ont produit la langue qui existait au moment de la séparation de nos idiomes, et dans ce passé lointain, qui jusqu’à présent n’apparaissait a nos yeux que comme un ensemble confus, il distingue sept périodes successives. Quand même les divisions marquées par le savant philologue devraient être en partie contestées, il faut saluer son ouvrage comme un progrès