Page:Bréal - Essai de Sémantique.djvu/61

Cette page a été validée par deux contributeurs.
45
IRRADIATION.

— vraie ou fausse — d’une désinence, que d’en retracer la naissance et la propagation.

Au sujet de ces verbes en urire, le président de Brosses, dans sa Méchanique des Langues, écrivait : « La terminaison latine urire est appropriée à un désir vif et ardent de faire quelque chose : micturire, esurire, par où il semble qu’elle ait été fondamentalement formée sur le mot urere et sur le signe radical ur, qui, en tant de langues, signifie le feu. Ainsi la terminaison urire était bien choisie pour déterminer un désir brûlant. »

Voltaire, plus avisé, proteste. Flairant quelqu’une de ces théories dont était coutumier le Président, il lui fait des objections. « Où est l’idée de brûler dans des verbes comme scaturire, « sourdre » ?… Ce petit système est fort en défaut ; nouvelle raison pour se défier des systèmes. »


Il existe en grec un groupe de verbes terminés en ιαω, qui expriment une maladie du corps ou de l’âme :

ὀδοντιάω, « avoir mal aux dents », de ὀδούς, « dent » ;

σπληνιάω, « avoir mal à la rate », de σπλήν, « rate » ;

λαρυγγιάω, « avoir mal à la gorge », de λάρυγξ « gorge », etc.

Le sens de maladie semble si bien inhérent à ces verbes, qu’on a pu joindre cette désinence à des mots de toute sorte :

μόλυβδος, « plomb »,μολυβδιάω, « avoir le teint plombé » ;

μόλυβδος, « plomb »,λίθος, « pierre »,λιθιάω, « avoir la maladie de la pierre ».