Ils aimaient et estimaient la besogne dont ils s’étaient volontairement chargés. Ils en connaissaient l’importance, car « il ne faut qu’un mauvais mot pour faire mépriser une personne dans une compagnie, pour décrier un prédicateur, un avocat, un écrivain. Enfin, un mauvais mot, parce qu’il est aisé à remarquer, est capable de faire plus de tort qu’un mauvais raisonnement, dont peu de gens s’aperçoivent. » Ils ont conscience de la durée de leur œuvre : « Je pose des principes qui n’auront pas moins de durée que notre langue et notre empire… Ce sont des maximes à ne changer jamais,… car quand on changera quelque chose de l’usage que j’ai remarqué, ce sera encore selon ces mêmes remarques que l’on parlera et que l’on écrira autrement[1]… »
On aurait tort de les prendre pour des logiciens à outrance. Au contraire : ils étaient arrivés à la conviction que la logique pouvait être de mise partout, mais non en matière de langage… « C’est la beauté des langues que ces façons de parler sans raison, pourvu que l’usage les autorise. La bizarrerie n’est bonne que là… Il est à remarquer que toutes les façons de parler que l’usage a établies contre les règles de la grammaire, tant s’en faut qu’elles soient vicieuses, ni qu’il faille les éviter, qu’au contraire on en doit être curieux
- ↑ Vaugelas, Remarques sur la langue française.