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LE LANGAGE ÉDUCATEUR DU GENRE HUMAIN.

mais est obligé de le reconstituer à nouveau. Il y a là un apprentissage qui, bien qu’échappant aux regards et inconnu de celui même qui s’y livre, n’en est pas moins une sorte de training-school de l’humanité. S’il est vrai que les meilleurs enseignements sont ceux qui nous donnent le plus à faire par nous-mêmes, quelle étude plus profitable peut-on concevoir pour l’enfant ?

Rien que pour reconnaître le mot, que d’attention ne faut-il pas ? car il s’agit de le dégager de ce qui précède et de ce qui suit, il s’agit de distinguer l’élément permanent des éléments variables et de comprendre que l’élément permanent nous est, en quelque sorte, confié, pour le manier à notre tour et pour le soumettre aux mêmes variations. En quelles occasions, en quelles rencontres, selon quels modèles ? La plupart du temps, personne ne nous en avertit : à nous de le découvrir. La phrase la plus simple est une invitation à décomposer la pensée et à voir ce que chaque mot y apporte. L’adjectif, le verbe sont les premières abstractions comprises par l’enfant. Ces pronoms moi et toi, mon et ton, qui, en changeant de bouche, se transforment de l’un à l’autre, contiennent sa première leçon de psychologie…

À mesure qu’on avance dans cet apprentissage, l’enseignement monte d’un degré.

Représentons-nous l’effort que devaient exiger