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L’ÉLÉMENT SUBJECTIF.

ce qui est exprimé en d’autres langues d’une façon plus ou moins détournée. Le français emploie le pluriel. Les bergers de Virgile s’interpellent eux-mêmes à la seconde personne :

Insere nunc, Melibœe, piros ; pone ordine vites !

On doit comprendre maintenant pourquoi il a toujours été si difficile de donner une définition juste et complète du verbe. Ce sont encore les anciens qui y ont le mieux réussi. Les modernes, en définissant le verbe « un mot qui exprime un état ou une action », laissent échapper une grosse partie de son contenu, — la partie la plus délicate et la plus caractéristique.


Si des modes et des temps nous passons aux personnes du verbe, les choses deviennent encore plus frappantes.

L’homme est si loin de considérer le monde en observateur désintéressé, qu’on peut trouver, au contraire, que la part qu’il s’est faite à lui-même dans le langage est tout à fait disproportionnée. Sur trois personnes du verbe, il y en a une qu’il se réserve absolument (celle qu’on est convenu d’ap-

    où elle a, au moyen, une forme correspondante en , peut faire croire qu’elle est ancienne. Nous aurions ici un débris archaïque qui, ne se rattachant plus à rien, a plus tard disparu presque partout de l’usage.