Page:Bréal - Essai de Sémantique.djvu/244

Cette page a été validée par deux contributeurs.
228
COMMENT S’EST FORMÉE LA SYNTAXE.

grammatical on exprime de cette façon : de démonstratif il devient relatif ou anaphorique.

Il faut déjà une syntaxe un peu avancée pour que cette transformation ait lieu : dans les diverses langues indo-européennes, le choix du pronom relatif est venu tard et il n’a pas été partout le même. Il suffit, pour s’en assurer, de comparer le latin qui au sanscrit jas et au grec ὅς. La langue grecque, au temps d’Homère, et même plus tard, au temps de Sapho et d’Alcman, n’a pas encore fait un choix définitif[1]. Elle a longtemps hésité entre les pronoms ja, ta et sva[2].

On doit se demander à quelle époque un moyen d’expression si nécessaire a commencé d’exister. Il faut, à cet égard, faire une distinction entre l’idée du pronom relatif et l’adoption définitive d’un certain pronom. L’idée du pronom relatif est très probablement antérieure à la séparation de nos idiomes, car nous trouvons partout un certain patron de phrase toujours le même, qui suppose la présence d’un pronom relatif. Les proverbes et adages populaires affectent volontiers ce tour :

Quod ætas vitium posuit, id ætas auferet. — Quod

  1. Dans la langue homérique, το est le pronom anaphorique ordinaire. Ex. : Εἰ μέν τις θεός ἐσσι, τοὶ οὔρανὸν εὐρὺν ἔχουσι. — Ἀλλὰ σὺ μὲν χαλκόν τε ἅλις χρυσόν τε δέξετο, Δῶρα, τά τοι δώσουσι πατὴρ καὶ πότνια μήτηρ. Etc.
  2. L’identification généralement admise de ὅς avec jas n’est pas certaine : d’après la forme Ϝότι conservée dans une inscription locrienne, on est amené à supposer que ὅς correspond à svas.