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COMMENT S’EST FORMÉE LA SYNTAXE.

hoc adeo ») est interprété par tat tvā jācē, « je te demande ceci ».


Voici maintenant une association d’idées qui est la contre-partie de la précédente.

Les verbes qui signifient « se retirer », quand ils deviennent transitifs, prennent le sens de « céder, abandonner ».

Cedo signifie proprement « se retirer » : c’est le sens qu’il a gardé dans recedo, discedo, decedo. Cedere alicui a donc signifié « se retirer par égard pour quelqu’un, lui céder le pas ». L’idée de céder le pas étant devenue ensuite le symbole de toute espèce de concession, cedo a pris le sens de « céder ». Puis, par un nouveau progrès, il a été construit avec un accusatif et a signifié « accorder ». Cedere multa multis de jure suo. — Cedere possessionem. — Cedere victoriam[1].

La même succession de sens se retrouve en grec. Εἴκω signifie se retirer. Εἴκειν θυράων, κλισμοῖο, πολέμου, « se retirer de la porte, d’un trône, de la guerre ». Les scoliastes le rendent par ὑποχωρέω, παραχωρέω.

On a dit ensuite : εἴκειν ὀργῇ, θυμῷ, ἀνάγκῃ, « céder à la colère, à la passion, à la nécessité ».

  1. Inversement, obstare est arrivé en français au sens d’enlever. On a dit d’abord : « ôter la retraite à quelqu’un, lui ôter les moyens de vivre ».