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ACQUISITIONS NOUVELLES

civilisation. Pour qu’une grammaire et un système morphologique atteignent le degré d’unité et de fixité que nous constatons à la base des langues aryennes, il faut une certaine perpétuité dans la tradition. Cette perpétuité suppose, sinon une littérature, du moins des formules, des chants, des textes sacrés transmis d’âge en âge.

Comme il n’y a aucune raison de supposer que les choses aient suivi dans ces anciens temps une marche plus accélérée, cela nous permet d’estimer à vue de pays l’étendue du passé. On vient de voir ce qu’il a fallu de temps pour que chacune de nos langues ait un infinitif, un passif, des désinences adverbiales. Encore le choix n’en est-il définitivement arrêté qu’après de longs siècles. D’autre part, l’acquisition d’instruments nouveaux, tels que l’article, les verbes auxiliaires, n’a pas exigé moins de temps. Nous devons donc accorder pour la période antérieure, bien autrement importante, un nombre de siècles au moins équivalent. La durée historique que nous pouvons embrasser du regard, depuis les premiers chants védiques jusqu’à nos jours, comprenant environ trois mille ans, ce n’est pas trop sans doute de demander trois mille autres années pour la période antérieure. Il n’a pas fallu moins pour fonder la séparation du nom et du verbe, pour établir la conjugaison et la déclinaison, pour en élaguer les parties inutiles, pour créer le méca-