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MADEMOISELLE CLOQUE

peu son œil, mais, à la façon des paresseux qui, pour s’épargner d’insister, préfèrent simuler avoir compris.

Il se laissa prendre à ce genre de léger mensonge, inconnu des êtres simples qui tiennent toujours à s’informer, et ne recueillit que le sourire et que l’œil animé qui l’avait un moment regardé en face, avec un commencement presque de familiarité.

Le galop final tirait à sa fin ; on était sur le point de se séparer. Il avait encore quelque chose à dire. Il se dépêcha, en laissant tomber sa voix. Cette fois, elle le regardait pendant qu’il parlait. Ce fut lui qui baissa les yeux :

— Mademoiselle, dit-il, c’est bien le moins que vous me connaissiez jusqu’au bout, puisqu’il s’agit de passer sa vie ensemble… Je ne veux pas vous tromper, sur rien… Eh bien, je sais qu’il y a des personnes qui sont plus ou moins difficiles, comme çà, sur les petites choses… Voilà : je me suis fait mettre deux dents fausses.

Il allait les lui montrer. Un tonnerre d’applaudissements brouilla tout. On se levait et chacun se déplaçait immédiatement. L’abbé regarda d’un œil malin les deux jeunes gens :

— Eh bien ! dit-il, il me semble que nous avons rompu la glace !… Ah ! cette jeunesse !…

Pour ne pas être remarqués, on se sépara.

Le notaire dit qu’il était enchanté d’avoir fait la connaissance de ces dames. Elles s’inclinèrent.