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MADEMOISELLE CLOQUE

choire inférieure, d’une main très blanche, assez fine, que déparaient de vilains doigts. Il portait de courtes côtelettes descendant des tempes. Toute la face était noyée dans une graisse molle, cireuse et mobile où les yeux, le nez et la large bouche rasée semblaient se déplacer et voguer en désordre comme des épaves sur une eau mouvante. Sa main nerveuse remontait par moments jusqu’au front aux rides puissantes, puis redescendait en appuyant fortement sur toute cette cire qui en semblait modelée à nouveau. Était-ce un tic, une lassitude des muscles, un massage réparateur, ou une manière de masquer son visage ? La tête penchée sur le côté, les genoux croisés dans une attitude un peu sans façon, prêtant de biais sa large oreille, il se pétrissait et se repétrissait.

Dès qu’il comprit que l’essentiel était dit, il arrêta Mlle Cloque, d’un signe de la main, et, pour la première fois, la regarda.

Il ne voyait d’elle que la flamme ardente de ses yeux foncés, qui étincelait dans sa face blême ; le reste de sa personne, noire, se confondait presque avec la teinte sombre du siège.

— Parfait ! dit-il, d’un timbre métallique qui fut désagréable. En résumé, mademoiselle, vous venez me trouver pour me prier de faire en sorte qu’il n’y ait pas de suite à la plainte déposée par moi contre la fille Pelet ?

Comme il semblait peser ses expressions,