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EN VACANCES

pas prolonger cette station, demanda à M. Houblon une chaise et un verre d’eau.

— Qu’avez-vous ? fit M. Houblon.

— Rien du tout, dit-elle ; mais je me fatigue vite et il fait si chaud !…

Elle avait vu entrer, dans le salon d’à-côté, M. et Mme de Grenaille-Montcontour accompapagnés de Marie-Joseph et de leur jeune belle-fille, la juive.

Et il fallait n’avoir pas l’air ému surtout devant Geneviève ; et il allait falloir affronter le contact et même les gracieusetés de ceux qu’elle considérait comme les pires ennemis de toutes ses conceptions morales, de la raison d’être de toute sa vie, de sa foi ; et assister à la rencontre des deux jeunes gens que sa conscience refusait d’unir, mais qu’elle ne pouvait séparer brusquement en ce moment-ci sous peine d’exposer la tendre et sensible Geneviève à donner lieu, malgré soi, à un scandale plus grave aux yeux du monde que celui de Léopoldine : à s’évanouir peut-être d’émotion, en face du sous-lieutenant.

Mlle Cloque pria Dieu de l’assister, et elle trouva la force de se lever et de garder toute sa présence d’esprit lorsque la famille de Grenaille pénétra dans la pièce. Elle les regarda s’approcher, les uns derrière les autres, par la porte, entre les étagères de verre garnies de bocaux de pralinés ou de boîtes de sucre d’orge en piles. C’était la jeune juive qui venait d’abord, en toi­-