Page:Boylesve - Mademoiselle Cloque, 1899.pdf/107

Cette page a été validée par deux contributeurs.
100
MADEMOISELLE CLOQUE

la dame de compagnie de la marquise, qui eut la bonne idée de me rapporter l’aventure avant d’en avoir fait reproche à la coupable…

— Et vous ne m’avez pas avertie que la Pelet était une voleuse !

— À quoi bon ? Vous lui eussiez coupé les vivres, et j’eus le pressentiment qu’elle méritait plus d’indulgence.

— Comment ! de l’indulgence ?

— Qu’importait à mon dîner trois écrevisses de moins ? Et ce goût pour une friandise m’intéressa aussitôt à Mlle Pelet. Je donnai l’ordre d’avoir l’air de fermer les yeux la première fois qu’elle viendrait. Quand elle se présenta, on lui offrit un morceau de pain. Elle demanda des tomates. Notez bien ceci, ma chère amie, des tomates ! On les lui refusa.

— Alors ?

— Alors, elle s’appropria clandestinement un petit bocal de pickles… un petit bocal de pickles, mal bouché qui se répandit en partie dans sa poche profonde, avant qu’elle ne fût sortie… On pouvait la suivre à la trace : elle a dû manger son piment sans vinaigre.

— Des pickles ! s’écriait Mlle Cloque au comble de l’indignation.

— Des pickles. Je n’eus plus aucun doute : Mlle Pelet était une ancienne courtisane.

Mlle Cloque qui ne comprenait pas la relation fronça les sourcils, et recula sa chaise.