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LES BAINS DE BADE

barbares, à qui la société impose de se faufiler constamment entre mille obstacles ennemis, pour atteindre tel but qui ne peut leur être indifférent. Ils essayent de tourner ces obstacles par la ruse, n’ayant point la faculté de les attaquer de front, ce à quoi ne manquent pas les Badois. Si je venais à croire, pour prendre un exemple frappant, que monsieur fût mieux pour mes intérêts, dans le lit de la rivière qui coule au bas de la fenêtre, plutôt qu’en celui-ci que j’ai gonflé du duvet de mes oies, je ne viendrais même pas dire à monsieur que le feu est en bas et qu’il est prudent de descendre par le bord de l’eau ; je prendrais monsieur par la peau du col et je le laisserais rejoindre l’écume des flots par la vertu de son poids spécifique. Personne ne s’aviserait d’y retrouver à redire…

— Tout beau ! mon cher hôte, interrompis-je avec vivacité ; je me pique d’une pointe de culture, quoique né barbare, et la droiture de votre caractère ne va pas sans me conquérir. Topez-là ! s’il vous plaît, et buvons ensemble quelque lippée de vin du Rhin !… Aussi bien je dispose de quelque