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pauvre chien qu’on a fouetté, elle lui dit : « — Tiens ! vas-y, toi !… » Et il partit aussitôt en courant, sans attendre qu’elle lui donnât une plus longue instruction. Elle s’étonna qu’il l’eût comprise à demi-mot et qu’il lui obéît si volontiers, et elle suivit du regard les pas du chevalier qui s’éloignait par l’allée des fontaines, goûtant, quant à lui, dans son âme neuve, la saveur du premier ravissement.

Dieutegard alla jusqu’au logis de Cornebille, situé contre le mur de clôture, au fond des jardins bas. Un lierre épais le dissimulait à demi ; la cheminée fumait à travers la verdure ; un chèvrefeuille garnissait l’entrée. Le chevalier porta la main à son cœur en traversant un petit potager planté de choux bien en ordre, de carottes, de chicorées écrasées sous des briques, et il regardait le trou noir de la porte grande ouverte, où il ne distinguait rien. Quand il eut franchi le seuil, seulement, il vit le jardinier, un long couteau à la main, qui faisait le signe de la croix sur l’envers du pain bis, avant de trancher la part de ses deux petits enfants et de sa femme, attablés vis-à-vis. Puis Dieutegard entra et dit, sans prendre haleine, que