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s’amusait, avec une baguette, à piquer ou fouetter les importunes sur une des épaules ou entre les lèvres du marbre.

Or, un jour de chaleur accablante, Ninon, étendue sur la mousse, regardait son Cupidon avec ces yeux quasi stupides qui ne nous déplaisent pas toujours chez les femmes. C’est comme une taie légère que Dieu dépose, en passant dans l’air chaud, et en disant : « Regard ! participe à la sublime imbécillité de la terre… ! » Puis il va plus loin répandre le même bienfait. Une meute fût passée là que Ninon ne l’eût pas vue : son front et ses tempes se rétrécissaient comme le haut d’une bourse dont on serre les cordons, pour presser une seule et malheureuse petite idée, la plus innocente et la plus enfantine en apparence.

Figurez-vous que le même coup de vent tiède où j’ai supposé que le Seigneur se faisait porter avait vêtu le Cupidon d’une courte culotte de feuilles mortes, qui, pour comique qu’elle parût, n’en était pas moins disgracieuse. Et la petite idée de Ninon consistait à aller ôter ce vêtement végétal, de sa propre main. Pourquoi pas avec la baguette ? Parce que, se disait-elle,