Mais elle se donnait le plaisir de le rêver plus jeune et plus beau.
Voilà le moment venu de raconter la folie qu’accomplit Ninon de complicité avec la statuette.
Vous savez le cas de notre pauvre petite marquise ; je ne vous ai pas caché qu’elle avait été élevée sans principes et qu’elle était dépourvue de cette intelligence robuste qui parfois supplée à cet inconvénient. Malgré cela, je suis convaincu que, si la Providence n’eût pas tant tardé à lui accorder la fillette qui devrait être née depuis longtemps pour que mon conte fût bien composé, rien de regrettable ne se fût produit. À défaut de cela, voilà ce qui advint :
Quand Ninon allait rêver seule auprès du bassin de l’Amour, elle regardait tomber les feuilles que la fin de l’été détachait une à une ; et celles que les marronniers semblaient jeter du haut du ciel avaient l’apparence de grandes mains gantées d’or qui palpaient l’air tiède en tâtonnant, et souvent s’arrêtaient à caresser l’Amour, avant de s’aplatir à la surface de l’eau. Certaines étaient gluantes et n’en finissaient plus de se détacher du petit corps. Ninon