Page:Boylesve - Lecon d amour dans un parc.djvu/277

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

miers, et, ayant reconnu la matière dont était composé ce spectacle, ils s’employèrent à en séparer les éléments. Châteaubedeau demandait grâce ; mais Cornebille le tenait serré dans un garrot et disait distinctement qu’il voulait lui faire exprimer son dernier jus, comme à un marc de raisin. Tout effort pour arracher les membres du page aux tentacules de cette pieuvre était inutile.

Ninon parvint à se faire jour à travers le groupe d’hommes qui voulait lui épargner tant d’horreur. Elle approcha, contint de la main son cœur ; elle essaya plusieurs fois de parler avant d’y réussir, tant elle était émue ; enfin elle prononça sur un ton suppliant :

« — Cornebille !… »

Comme un chien appesanti par le sommeil se trouve soudain sur les pattes à la voix de son maître, le monstre, en entendant son nom tomber de cette bouche, détourna les yeux de sa proie, et laissa un instant s’égarer dans le vide sa prunelle rougeoyante. Je ne sais pas ce qu’il voyait, car la passion sauvage de cet homme me dépasse. Cependant il ne lâchait point les membres de Châteaubedeau, qui lui,