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savait n’être pas loin de là ; puis il profita de ce qu’il était près de la statuette pour l’enlacer, et baiser la place où Ninon, un jour, avait posé ses lèvres.

Ce fut dans ce mouvement, et comme il interceptait de son corps le marbre, que le coup tiré par Ninon l’atteignit en plein cœur. Et il retomba, à demi dans l’eau, à demi sur le socle de l’Amour.

Ninon, qui avait enfin retrouvé le secret du chemin, accourait avec Châteaubedeau. Elle arriva au bassin, le malheur irrémédiablement accompli, et elle vit ce jeune homme, les pieds baignant dans l’eau et sa belle tête exsangue, renversée sur la dure marche de pierre. Elle ne se pâma point, car elle croyait d’abord n’avoir blessé qu’un malandrin. Ce fut en s’inclinant à la margelle, dans une attitude inquiète et charmante qui eût rappelé à la vie le chevalier s’il l’eût pu voir, qu’elle reconnut la victime de sa chasse malheureuse. Et dans le temps qu’elle remettait le visage de Dieutegard, — presque pareil, quoique amaigri et flétri, à celui qu’il avait eu, en ce lieu même, le jour où elle avait tant souhaité qu’il la baisât