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vois, où les gens de Touraine traversent le fleuve pour gagner la vallée d’Anjou.

Je regrette bien de n’avoir pas connu M. Lemeunier de Fontevrault, car son goût pour les jardins me l’eût fait beaucoup aimer. Mais il est doux aussi de regretter une belle figure dont un long espace de temps nous sépare ; on l’imagine plus pure et plus séduisante, et l’on a le droit de ne pas douter qu’elle vous eût choisi pour ami, ce qui n’est pas sûr. Et puis je me dis que M. Lemeunier de Fontevrault, ayant planté lui-même son parc, vit ses arbres moins hauts, ses berceaux moins touffus, ses charmilles moins mystérieuses que nous n’allons les contempler. Enfin, à parler franc, puisque nous avons une dizaine d’années à passer dans ce château de Fontevrault, je préfère y voir la jeune héritière en sa pleine beauté, c’est-à-dire de vingt à trente ans, plutôt que de l’y suivre à l’âge ingrat ; d’autant plus qu’elle ne va pas tarder à avoir une fille qui sera beaucoup plus intéressante qu’elle sous le rapport de l’esprit. M. Lemeunier de Fontevrault avait ramené Ninon on ne sait d’où, car il était grand voyageur, l’avait fort