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pendait de tant d’éléments divers et étrangers à leur indolence même ! Oh ! ça n’est pas encore brillant, mais ça vient, ça s’arrange : j’ai beaucoup mieux que de l’espoir ; ce sera une réussite complète si… si… — et c’est là que j’aurai besoin de toi, ma Luisa, — si les femmes du monde, et toi à leur tête, veulent bien nous aider.

Je veux recréer tous les arts manuels ; tous les arts industriels qu’un homme ou une femme adroits de leurs mains, peuvent exécuter chez eux. Nos pauvres gens ne sont pas dépourvus d’habileté ; ils ont presque tous un goût inné. Je veux que toutes les dames romaines donnent la préférence aux objets fabriqués à la main, sur tous les produits d’une industrie qui, hélas ! n’est pas nationale. Il ne faut tirer de notre peuple que ce qu’il peut donner ; mais encore, ce qu’il peut donner, faut-il le lui prendre ! Il y a là une question de propagande, même une question de mode à lancer. Le bruit fait autour de mon entreprise, dans le monde politique, et qui s’étendra, rendra cette tâche facile. Le président du Conseil m’a fait appeler, ces jours-ci, afin de prendre des renseignements minutieux sur cette affaire ; et d’autre part, j’ai vu le Roi qui m’a fort encouragé. Nous aurons, je pense, un bon hiver, et ce ne serait que le commencement de plus grandes choses. Dieu sait si notre Rome a besoin de grandes choses !

Vers la fin du mois, j’espère pouvoir prendre une quinzaine de jours de liberté. Ce sera pour aller vous rejoindre dans le paradis des îles Borromées que tu me décris sous des couleurs si riantes. Mais encore faudra-t-il que je passe à Florence, où l’on m’accuse de m’occuper beaucoup trop de Rome et où tout un parti s’est formé contre moi à l’occasion de l’Œuvre du Transtévère.