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soins de la maternité ? Mais il n’y avait qu’à écouter parler cinq minutes cette petite Parisienne-là, pour se convaincre qu’elle apportait une égale perspicacité dans les choses de l’esprit et dans celles du cœur. Tout particulièrement dans ses rapports avec sa « sœurette », elle avait une façon de prononcer seulement son nom, qui faisait que chacun en était attendri.

À la vérité, voici quels étaient exactement à l’heure actuelle les rapports de Mme de Chandoyseau et de sa « sœurette ».

Solweg, pressée ces jours derniers par de nouvelles demandes en mariage, avait avoué tout net à sa sœur qu’elle n’avait pas plus de répugnance pour celui-ci que pour celui-là, mais qu’elle était résolue une fois pour toutes à ne plus répondre à ce propos, parce qu’elle ne voulait pas se marier.

— Mais tu aimes donc quelqu’un ? s’était écriée Mme de Chandoyseau étonnée.

Solweg avait répondu simplement :

— Oui.

Quant à savoir qui Solweg aimait, ce ne fut pas long dès lors à découvrir.

Mme de Chandoyseau demeura atterrée. D’abord parce que rien au monde ne pouvait la vexer davantage que de n’avoir pas soupçonné la secrète passion de la jeune fille. En second lieu parce qu’elle comprit la sottise colossale qu’elle avait commise en s’acharnant à détruire la réputation du jeune homme, qui, à tout bien considérer, eût été un parti excellent pour Solweg. Tel avait été son « art de prévoir et de deviner ».

Sans doute, elle avait songé à Dompierre pour Solweg dès la première semaine, comme cela fût arrivé au premier venu qui voit en présence un jeune homme et une jeune fille ; elle les avait même fait danser ensemble. Mais elle n’avait même pas su s’employer à