XXII
La multitude des connaissances que Mme de Chandoyseau s’était faite à l’Hôtel des Îles-Borromées fêta son retour. Elle fut entourée dès la première matinée ; on lui demanda mille détails sur ses impressions au lac de Côme. Tout le monde fut ému de l’indisposition de Mlle Solweg, et les questions au sujet de cette chère enfant qui n’était pas encore complètement remise, ne tarissaient pas.
— Ah ! mesdames, disait Mme de Chandoyseau, savez-vous quel fardeau délicat c’est d’avoir à soi une jeune fille ! Car il faut bien que je sois sa maman ! C’est un âge qui exige tant de soins, tant de minutieux ménagements, tant de subtiles prévisions, dirai-je même, car il faut voir pour elle, étudier à la fois son entourage et sa vie intérieure. Prévoir et deviner, n’est-ce pas l’art d’une mère ?
On la complimentait ; on admirait son tact et son intelligence. Qui donc prétendait que les femmes ne sauraient mener de front les préoccupations intellectuelles et les soins de la famille ? Et il se trouvait des gens pour vous faire entendre, en haussant les épaules, que les femmes à la mode ne sauraient s’embarrasser des