IX
« Je viens, je viens, ma femme bien-aimée ! » telle était la phrase qui se répétait, avec une insistance pleine de tendresse, dans les lettres quotidiennes de M. Belvidera.
Le courrier du matin arrivait un peu avant midi. Le portier de l’hôtel faisait le tour des salons et du hall ; de longues Américaines interrompaient leur balancement dans la rocking-chair pour recevoir d’énormes paquets de journaux ficelés et leur correspondance ; des Italiennes qui tenaient leurs bras nus appliqués sur la surface fraîche des petites tables de marbre, lisaient aussi à distance, en prononçant à haute voix quelques phrases d’un ton toujours trop élevé. Quand Mme Belvidera avait parcouru la lettre de son mari, et que la petite Luisa n’était pas là pour lui poser mille questions au sujet de son père, la jeune femme laissait aller sa tête contre le dossier de jonc souple et craquant, et les paupières baissées, la bouche grave, elle songeait, avec l’espoir secret que quelqu’un viendrait l’interrompre et l’empêcher de penser.
Elle se revoyait à l’âge qu’avait aujourd’hui sa fille, enlevée brusquement de Florence par la mort presque