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lui mit le goupillon à la main ; et elle ne s’en allait plus. On dut la pousser, car beaucoup d’autres personnes avaient à faire le même signe d’adieu. Privée du seul caractère solide qu’elle eût rencontré le long de sa vie, elle s’en allait à la dérive, et elle ne reconnaissait plus les gens qui lui tendaient la main.

Courance parut dépeuplé. L’oncle Planté alla à la chasse, un jour, et ne revint pas. On le trouva, la nuit, sous les sapins d’Épinay que vénérait sa femme et grâce à Mirabeau qui faisait retentir le bois de ses hurlements. Son fusil lui était parti dans la figure. Ceux qui avaient compris le muet amour de cet homme timide pour sa femme, ne s’étonnèrent pas outre mesure de l’accident.

Un mercredi, la voiture de Sucre-d'Orge monta l'allée des ormes comme autrefois. On crut rêver ; on se demanda si le temps avait coulé. Le fidèle ami venait réclamer, selon son droit, le chapeau et la canne. Quelqu'un les avait déposés sur le canapé d'utrecht ; et personne n'osait ytoucher. À les voir là, on eût dit que Félicie était sur le point de sortir. M. Laballue fit une courte visite et prit les objets, pieusement. Il les tint à la main, de la porte du pavillon à sa voiture, et les plaça à côté de lui sur le coussin. On les regarda s'en aller, tant qu'on put, jusqu'à la grille.

FIN

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