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malheureux pour son infraction doit contribuer au bonheur général, qui est préférable dans ce cas au bien particulier.

« J’ajoute encore que l’on ne peut même trop noter d’infamie les parents, les amis et tous ceux qui ont des habitudes avec un criminel, pour engager, par ce trait de politique, tous les humains à s’inspirer mutuellement entre eux de l’horreur pour les actions et pour les crimes qui peuvent troubler la tranquillité publique, tranquillité que notre disposition naturelle, que nos besoins, que notre bien-être particulier nous portent sans cesse à enfreindre ; disposition, enfin, qui ne peut être absorbée dans l’homme que par l’éducation, qu’au moyen des impressions qu’il reçoit dans l’âme par la voie des autres hommes qu’il fréquente ou qu’il voit habituellement, soit par le bon exemple, soit par les discours ; en un mot, par les sensations externes qui, jointes aux dispositions intérieures, dirigent toutes les actions de notre vie. Il faut donc aiguillonner, il faut nécessiter les hommes à s’exciter entre eux à ces sensations utiles au bonheur général.

« Je crois, madame, ajouta l’abbé, que vous sentez présentement ce que l’on doit entendre par le mot de nature. Je me propose de vous entretenir