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« Eh bien ! madame, continua l’abbé T…, que les femmes et les filles fassent comme Thérèse et vous ; si ce jeu ne leur plaît pas assez (comme en effet il ne plaît pas à toutes), qu’elles se servent de ces ingénieux instruments nommés godemichés ; c’est une imitation assez naturelle de la réalité. Joignez à cela que l’on peut s’aider de l’imagination. Au bout du compte, je le répète, les hommes et les femmes ne doivent se procurer que les plaisirs qui ne peuvent pas troubler l’intérieur de la société établie. Les femmes ne doivent donc jouir que de ceux qui leur conviennent, eu égard aux devoirs que cet établissement leur impose. Vous aurez beau vous récrier à l’injustice ; ce que vous regardez comme injustice particulière assure le bien général, que personne ne doit tenter d’enfreindre.

« — Oh ! je vous tiens, monsieur l’abbé, répliqua Mme C… ; vous venez me dire présentement qu’il ne faut pas qu’une femme, qu’une fille se laissent faire ce que vous savez par les hommes, ni qu’un honnête homme trouble l’intérêt public en cherchant à les séduire, tandis que vous-même, monsieur le paillard, m’avez tourmentée cent fois pour me mettre dans ce cas, et qu’il y a longtemps que ce serait une besogne faite, sans la crainte insurmontable que j’ai toujours eue de devenir grosse ;