Page:Boyer d’Argens - Thérèse philosophe.djvu/173

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Déjà l’emportement semblait avoir banni la philosophie de l’homme maître de lui-même, lorsque vous me dites avec des sons mal articulés : Je n’userai pas, Thérèse, de tout le droit qui m’est acquis : tu crains de devenir mère, je vais te ménager ; le grand plaisir s’approche ; porte de nouveau ta main sur ton vainqueur, dès que je le retirerai, et aide-le, par quelques secousses, à… Il est temps, ma fille ; je… dé… plaisir… — Ah ! je meurs aussi, m’écriai-je ; je ne me sens plus, je… me… pâ…me !… »

Cependant, j’avais saisi le trait, je le serrais légèrement dans ma main, qui lui servait d’étui, et dans laquelle il acheva de parcourir l’espace qui le rapprochait de la volupté. Nous recommençâmes, et nos plaisirs se sont renouvelés, depuis dix ans, dans la même forme, sans trouble, sans enfants, sans inquiétude.

Voilà, je pense, mon cher bienfaiteur, ce que vous avez exigé que j’écrivisse des détails de ma vie. Que de sots, si jamais ce manuscrit venait à paraître, se récrieraient contre la lasciveté, contre les principes de morale et de métaphysique qu’il contient ! Je répondrai à ces sots, à ces machines lourdement organisées, à ces espèces d’automates, accoutumés à penser par l’organe d’autrui, qui ne font telle ou telle chose que parce qu’on leur dit de les faire, je leur répon-