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de Priape m’enchantaient, me transportaient, par la conformité du goût de la petite femme au mien. Machinalement, ma main droite se porta où celle de l’homme était placée, et j’étais au moment d’y enfoncer le doigt, lorsque la réflexion me retint. J’aperçus l’illusion, et le souvenir des conditions de notre gageure m’obligea de lâcher prise.

Que j’étais bien éloignée de vous croire spectateur de mes faiblesses, si ce doux penchant de la nature en est une, et que j’étais folle, grands dieux ! de résister aux plaisirs inexprimables d’une jouissance réelle ! Tels sont les effets du préjugé : ils nous aveuglent, ils sont nos tyrans. D’autres parties de ce premier tableau excitaient tour à tour mon admiration et ma pitié. Enfin, je jetai les yeux sur le second. Quelle lasciveté dans l’attitude de Vénus ! Comme elle, je m’étendis mollement ; les cuisses un peu éloignées, les bras voluptueusement ouverts, j’admirais l’attitude brillante du dieu Mars. Le feu dont ses yeux, et surtout sa lance, paraissaient être animés passa dans mon cœur. Je me coulais sur mes draps, mes fesses s’agitaient voluptueusement, comme pour porter en avant la couronne destinée au vainqueur.

« Quoi ! m’écriai-je, les divinités même font leur bonheur d’un bien que je refuse ! Ah ! cher amant,