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nisation de nos corps, joint aux idées que nous recevons journellement par le tact, l’ouïe, la vue, l’odorat et le goût ; secondement que le bonheur ou le malheur de notre vie dépendent de cette modification de la matière et de ces idées ; qu’ainsi les génies, les gens qui pensent ne peuvent trop se donner de soins et de peines pour inspirer des idées qui soient propres à contribuer efficacement au bonheur public, et particulièrement à celui des personnes qu’ils aiment. Et que ne doivent pas faire à cet égard les pères et les mères envers leurs enfants, les gouverneurs, les précepteurs envers leurs disciples !

Enfin, mon cher comte, vous commenciez à vous sentir fatigué de mes refus, lorsque vous vous avisâtes de me faire venir de Paris votre bibliothèque galante, avec votre collection de tableaux dans le même genre. Le goût que je fis paraître pour les livres, et encore plus pour la peinture, vous fit imaginer deux moyens qui vous réussirent. « Vous aimez donc, mademoiselle Thérèse, me dîtes-vous en plaisantant, les lectures et les peintures galantes ? J’en suis ravi : vous aurez du plus saillant ; mais capitulons, s’il vous plaît : je consens à vous prêter et à placer dans votre appartement ma bibliothèque et mes tableaux pendant un an, pourvu que vous vous engagiez à rester pendant quinze jours sans porter même