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sur la volonté ; servez-vous de vos avantages pour faire naître en moi celles que vous croirez les plus propres pour me déterminer à contribuer sans réserve à vos plaisirs. En attendant, je suis votre amie, etc…

Je me rappelle que vous m’interrompîtes à ce doux épanchement de mon cœur. Vous me promîtes que vous ne contraindriez jamais mon goût et mes inclinations. Tout fut arrangé. J’annonçai le lendemain mon bonheur à la Bois-Laurier, qui fondit en larmes en me quittant, et nous partîmes enfin pour votre terre, le jour que vous aviez fixé.

Arrivée dans cet aimable séjour, je ne fus pas étonnée du changement de mon état, parce que mon esprit n’était occupé que du soin de vous plaire.

Deux mois s’écoulèrent sans que vous me pressassiez sur des désirs que vous cherchiez à faire naître insensiblement dans moi. J’allais au-devant de tous vos plaisirs, excepté de ceux de la jouissance, dont vous me vantiez les ravissements, que je ne croyais pas plus vifs que ceux que je goûtais par habitude, et que j’offrais de vous faire partager. Je frémissais, au contraire, à la vue du trait dont vous menaciez de me percer. Comment serait-il possible, me disais-je, que quelque chose de cette longueur, de cette grosseur, avec une tête aussi