Page:Boyer d’Argens - Thérèse philosophe.djvu/146

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

reproches, dont elle se défendit en plaisantant, et, en femme qui sait son monde, elle tâcha de faire diversion par l’arrivée d’un convoi de bouteilles de vin de Bourgogne qui furent bientôt sablées.

Cependant, les outils de nos Pères reprennent leur première consistance. Les libations bachiques sont interrompues de temps à autre par des libations à Priape. Toutes imparfaites qu’étaient celles-ci, nos frapparts semblent s’en contenter, et tantôt mes fesses, tantôt leurs revers, servent d’autels à leurs offrandes.

Bientôt une excessive gaieté s’empare des esprits. Nous mettons à nos convives du rouge, des mouches : chacun d’eux s’affuble de quelqu’un de mes ajustements de femme ; peu à peu je suis dépouillée toute nue et couverte d’un simple manteau de capucin, équipage dans lequel ils me trouvèrent charmante. « N’êtes-vous pas trop heureux, s’écria la Dupuis, qui était à moitié ivre, de jouir du plaisir de voir un minois comme celui de la charmante Manon ? »

« Non, ventrebleu ! répliqua Père Ange d’un ton de fureur bachique ; je ne suis point venu ici pour voir un minois : c’est pour f..... un c.. que je m’y suis rendu ; j’ai bien payé, ajouta-t-il, et ce v.. que je tiens en main n’en sortira, ventredieu ! pas qu’il n’ait f....., fût-ce le diable ! »