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moins que manchot, saute sur Père Ange ; tous deux se saisissent, se collètent, se culbutent, se déchirent à belles dents ; leurs robes, relevées sur leurs têtes, laissent à découvert leurs misérables outils, qui, de saillants qu’ils s’étaient montrés, se trouvaient réduits en forme de lavettes. La Dupuis accourut pour les séparer ; elle n’y réussit qu’on appliquant un grand seau d’eau fraîche sur les parties honteuses de ces deux disciples de saint François.

Pendant le combat, Père Hilaire ne s’amusait point à la moutarde. Comme je m’étais renversée sur le lit, pâmée de rire et sans force, il fourrageait mes appas et cherchait à manger l’huître disputée à belles gourmades par ses deux compagnons. Surpris de la résistance qu’il rencontre, il s’arrête pour examiner de près les débouchés ; il entr’ouvre la coquille, point d’issues. Que faire ? Il cherche de nouveau à percer : soins perdus, peines inutiles. Son instrument, après des efforts redoublés, est réduit à l’humiliante ressource de cracher au nez de l’huître qu’il ne peut gober.

Le calme succéda tout à coup aux fureurs monacales. Père Hilaire demanda un instant de silence ; il informa les deux combattants de mon irrégularité et de la barrière insurmontable qui fermait l’entrée du séjour des plaisirs. La vieille Dupuis essuya de vifs