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Mais, disent quelques-uns de ces fanatiques de la république des lettres les gens qui faisoient ces ouvrages avoient de l’esprit : ceux qui les achetoient, & qui les recevoient étoient des ignorans. Je demande, s’il étoit possible qu’il n’y eût que sept à huit personnes renfermées dans une maison qui eussent du génie ? Si l’on répond que toute la raison & la lumière du genre-humain n’étoient pas renfermées dans un seul couvent de moines, il faudra avouer que les autres sçavans, répandus dans divers endroits de l’Europe, & qui écrivoient les ouvrages qui nous restent aujourd’hui, eussent fait quelque mention de ces fabricateurs d’écrits anciens.

En vérité, mon cher Brito, tout homme qui soutient le systême de ce moine Hardouin, doit opter de passer pour fou, ou pour fanatique : c’est avoir trop de bonté, que de vouloir réfuter un pareil ramas d’extravagances. Voici une raison sur laquelle les ennemis des auteurs anciens soupçonnent les œuvres de Virgile d’être apocryphes. Pline le naturaliste, disent-ils, parle d’un Virgile, auteur des Bucoliques, & ne dit pas un mot de l’Enéïde : donc l’Enéïde que nous avons n’est pas du même Virgile que les Bucoliques. Je