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impénétrable dans son secret, & aussi retenue pour ce qui la regarde, que peu réservée pour les affaires des autres. Pour être convaincu de cette vérité, il ne faut qu’examiner les principaux événemens des derniers regnes. La ligue avoit en vain cherché les moyens de faire assassiner Henri III. Madame de Montpensier, sœur des Guises, fait exécuter ce projet dès qu’elle s’en mêle : elle sçait faire entrer adroitement un moine dans ses desseins ; & elle lui persuade le crime le plus énorme, sous les apparences de la religion. Les desseins pernicieux des Espagnols contre Henri IV, n’auroient jamais eu leurs funestes effets ; s’ils n’eussent été appuyés que du vieux duc d’Epernon : la duchesse de Verneuil, maîtresse disgraciée de ce monarque, conjure contre lui : il en est la victime infortunée.

Le pouvoir des femmes & leur domination règlent la plûpart des mouvements de l’empire Ottoman. Qui croiroit qu’une sultane dans le fond du serrail, à qui la vûe des mortels qu’une opération barbare n’a pas ôtés du rang des hommes semble être défendue, gouverne la Turquie, nomme le visir & le moufti, prend les intérêts du bacha du Caire, ou de celui de Babylone, qu’elle n’a jamais connus ; & par une circulation infinie, fait transpirer jusqu’au bout de l’empire,