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je crois, mon cher Isaac, qu’il faut, autant qu’on peut, consulter les auteurs originaux. Qui peut mieux connoître les mœurs d’un état qu’un auteur qui y est né & élevé, qui écrit dans la sein de sa patrie, & à qui les mœurs, les coutumes, les loix du pays dont il parle sont familiers ? Quel est l’auteur moderne assez vain pour se flatter de connoître les anciens Grecs aussi-bien que Thucydide, Xénophon & Plutarque. Les historiens qui ont écrit aujourd’hui de leur nation, n’ont pû approcher, pour la noblesse, pour la majesté & pour la grandeur, de Tite-Live & de Tacite. Comment pourroient-ils atteindre le vrai qui regne dans les caractères qu’ils nous ont laissés, & qu’ils copioient d’après nature ?

Je fais généralement peu de cas des écrivains modernes qui composent des histoires sur les événemens des tems éloignés. Je les regarde comme des compilateurs ; je ne considère guère plus leurs ouvrages que comme ceux des mauvais traducteurs. Quiconque veut connoître le vrai caractère des Grecs & des Romains, doit le chercher dans les originaux. Ne seroit-il pas ridicule, si un Anglois, pour s’instruire des mœurs, des coutumes & du génie