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ou S. Philippe de Néry, un musicien qui se fait payer très-cher, & qui ne joue du violon que dans certaines occasions, attire une grande affluence de personnes. S. François & S. Jean de Matha n’ont peut-être jamais eu le plaisir d’avoir une bonne symphonie, faute de pouvoir la payer.

En sortant de ces assemblées, que les Piémontois appellent salut, ils vont se promener jusqu’à l’entrée de la nuit dans les places publiques. L’esplanade, qui se trouve entre la ville & la citadelle, est la promenade la plus usitée pendant les chaleurs de l’été. C’est-là où les nobles Piémontois, la tête haute comme des autruches, la main dans la ceinture & la contenance fière, vont étaler leur figure,mi-partie Françoise & mi-partie Italienne. Ils n’en sortent que pour aller dans un caffé boire une tasse de liqueur glacée, qui leur sert ordinairement de soupé. [1]

Les Piémontois pratiquent fort la frugalité : belle qualité, si cette vertu n’étoit pas chez eux une suite de leur avarice. Ils sont charmés de trouver dans la chaleur de leur climat, un prétexte qui les dispense de manger le soir. Mais il semble que ce régime de vie, nécessaire à leur santé, n’est point observé

  1. C’est aussi le soupé de tous les Italiens.