Elles ne sçauroient me tromper, puisqu’elles sont une suite de ma raison. Elles ne sçauroient être fausses, étant véritables par la ressemblance qu’elles ont avec la bonté & la justice de Dieu, que ma raison me démontre devoir être telle.
Ecarte, mon cher Isaac, pour un moment les préjugés de l’enfance, & contemple d’un œil philosophique un nazaréen honnête-homme, & qui vit au milieu de Paris. Il croit & sert le même Dieu que nous. Il suit les dix commandemens qu’il donna à Moïse. Il est élevé dans des préjugés qui lui font regarder notre sainte loi comme accomplie, & celle qu’il professe comme la nouvelle alliance. Tu sçais la force des préjugés & des premières idées qu’on nous inspire. Les auteurs Arabes disent que les directeurs des jeunes gens dominent sur les astres de leur naissance. Pourquoi veux-tu croire, mon cher Isaac, que Dieu ait voulu lier ce nazaréen par des liens si forts, & l’empêcher d’entrer dans la foi d’Israël uniquement pour avoir le plaisir de le perdre ?
Je frémis lorsque je lis dans quelques livres nazaréens ce principe impie, qu’il faut qu’il y ait des damnés pour la gloire de Dieu, comme les rois ont pour la leur des forçats & des esclaves sur