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écrit d’une façon vive & aisée : on voit qu’il a été à même de connoître les caractères qu’il dépeint.

Sans rechercher de paroître avoir autant d’esprit que le premier auteur dont je t’ai parlé, il présente par-tout la vérité sous une forme aimable. Si l’on peut lui trouver quelque défaut, c’est celui de s’expliquer un peu trop hardiment. On lui reproche aussi quelque négligence pardonnable à un homme qui écrit en général aussi purement que lui. Voici le portrait qu’il fait de la solitude. Ce n’est point pour se tourmenter qu’un homme sage semble se séparer des hommes. Il n’a garde de s’imposer de nouvelles loix : il se contente de suivre celles qu’il a trouvé prescrites. S’il en fait de nouvelles, il se réserve d’être le maître de les changer : il s’en rend le souverain, & point l’esclave. Content de ralentir ses passions, de les gouverner par sa raison, il ne se flatte point de l’impossible pouvoir de les dompter à son gré, & ne se fait point un monstre de ce qui fut autrefois pour lui un amusement innocent. Il conserve dans la solitude tous les plaisirs que les honnêtes gens goûtent dans le monde, & leur ôte seulement le moyen de nuire en devenant trop violens.