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ennemis de Dieu & de l’état ; mais qui plus est les miens. Vous vous informerez exactement des livres qui auront été donnés par de fameux molinistes, & vous les éleverez jusqu’au troisiéme ciel, & sur-tout ceux qui pourroient être faits par les jésuites, fût-ce même par leurs frères-lais. Vous critiquerez fortement la nouvelle tragédie de Voltaire, & ne manquerez pas de lui bien reprocher qu’il n’a point de religion quoique que vous en ayez peut-être moins que lui. Cela ne doit vous faire aucune peine : ce n’est qu’une injure qu’il est nécessaire de dire à cet auteur, pour exciter contre lui le courroux de tous les dévots, & des gens qui ne le connoissent point. Le révérend pere recteur me dit hier qu’on ne sçauroit trop le punir d’avoir répandu le venin du jansénisme dans sa Henriade & dans son Oedipe. Je suis, monsieur, &c.

Tu trouveras, sans doute, mon cher Isaac, cette lettre amusante & particulière. Le chevalier de Maisin & moi nous en jugeâmes de même. Nous plaisantâmes beaucoup le libraire sur les louanges qu’il vouloit qu’au donnât aux mauvais livres. Si l’on n’imprimoit, répondit-il, que de bons ouvrages, la moitié des libraires de l’univers mourroient de faim, & l’autre moitié ne seroit