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petite faute, la plus légère distraction, causent souvent le trépas.

La ville impériale n’offre rien de plus gracieux que la cour. On est sans cesse épouvanté par le récit de l’éxil ou de la mort des plus considérables citoyens. Chaque grand visir nouveau sacrifie un certain nombre de victimes à son avarice, dès qu’il est parvenu à ce haut rang. Constantinople est une bergerie où l’on engraisse des troupeaux dont on égorge de tems en tems les plus gras & les meilleurs. Les juifs & les grecs sont les plus exposés à ces violences. Ils achetent cherement l’avantage de pouvoir exercer leur religion : on les met perpétuellement à la presse ; & on leur enlève sans pitié le fruit de leurs peines & de leurs travaux. Notre nation est sans cesse tourmentée à Constantinople. Dans les tems de calme & de paix, nous sommes en proie à l’avidité des officiers de la Porte ; & dans les troubles & les séditions, nous devenons le jouet d’une insolente milice, dont nos richesses assouvissent souvent la cupidité. Il semble que nous ayons plus de liberté dans les pays mahométans, que dans les nazaréens. Cependant nous y sommes beaucoup plus persécutés, & pour le moins autant haïs.

Je ne sçais si tu as quelque connoissance de l’avanie que les Persans